Djinn Djow au Mandé : le retour à la source

Le Mandé est traditionnellement une terre de culture, le berceau géographique et/ou mythique de toute la musique dite « mandingue » et de ses instruments : kora, balafon, tambour djembé... Depuis une vingtaine d'années, le rayonnement de ce dernier instrument va très au-delà des frontières de sa terre natale, Mali et Guinée, jusqu'en Côte d'Ivoire, au Burkina Faso, au Sénégal et désormais dans tous les pays dits « du nord », auprès de musiciens qui, au travers d'approches diverses et pour le moins variées, adoptent le djembé et ses danses. C始est ainsi que dès 1989, date de la création de la troupe, on retrouve cette percussion au coeur de la démarche artistique de la Cie Djinn Djow. Ce succès international d始un instrument, ainsi que celui de quelques vedettes maliennes, ne doit pourtant pas cacher la réalité. Sur ses propres terres, il en est de cette musique comme des glaciers en Europe, en Asie ou en Amérique du nord : lentement mais sûrement, elle est en train de disparaître.


La vie culturelle mandingue est victime de l'exode rural et de la rapidité de la transformation du milieu social : émigration vers les capitales et/ou vers les pays occidentaux, non transmission des traditions faute d'acteurs culturels traditionnels, absence de reconnaissance officielle et de moyens financiers pour les cultures traditionnelles, disparition des structures d'apprentissage... Quand un musicien est doué, il part tenter sa chance à Bamako et sa vie artistique se déroule à la capitale ou, s始il a de la chance, à l始étranger. Au même moment et par conséquence, la tradition se tarit à la source, dans l始arrière-pays, dans un contexte de complexe d'infériorité culturelle qui fait que les jeunes sont insensibles aux traditions


En contribuant à la création d始un centre culturel au coeur du Mandé, la Cie Djinn Djow et ses partenaires au Mali ne cherchent pas à maintenir une culture sous perfusion, mais bien à rendre compte de la complexité des arts dits traditionnels : de fait, les musiques maliennes d'aujourd'hui n'ont plus grand chose à voir avec celles des siècles passés. Comme dans toute culture, elles sont le fruit d'une évolution naturelle et mérite en tout point l'appellation de « musiques vivantes ». Reconnues à leur juste valeur, les multiples expressions des culturels villageoises sont à la fois un ciment social, un vecteur de paix et d始échanges entre les communautés et un possible atout pour un tourisme culturel intelligent à développer.
 


 

Depuis 2005, la Cie Djinn Djow a activement participé au rayonnement du centre culturel Bougou Saba et en son sein, à celle de la troupe villageoise Mandé Koulou, qu始elle continue à encadrer. En initiant une dynamique de concerts villageois, elle a offert à cette jeune troupe à la fois un modèle et une base de travail pour l始organisation de la toute première Rencontre des artistes traditionnels du Mandé. C始est ainsi qu始en mai 2010, plus de 250 artistes villageois, venus de douze villages des quatre plus grandes communes de cette vaste région, se sont retrouvés et ont offert au public de Siby des chants et des danses qu始on croyait parfois oubliés, ainsi que des mises en scène de cérémonies traditionnelles. L始occasion, pour la première fois dans l始histoire du Mali moderne, de réunir les acteurs culturels et de leur permettre de discuter de leurs problèmes, de leurs besoins, et de l始importance de leurs diverses expressions artistiques comme vecteurs de valeurs et d始identité culturelle.
 

La tournée de la Cie Djinn Djow à travers le Mandé, ses stages et les formations qu始elle encadre entre décembre 2010 et mai 2011, s'inscrivent dans la continuité de cet événement. En présentant son spectacle dans les villages qui ont participé à la première Rencontre, puis en réunissant élèves suisses et membres de la troupe Mandé Koulou dans un même cadre de travail, elle en prépare la deuxième édition en rassemblant les acteurs culturels autour d始un projet fédérateur.